Cap à l’ouest vers la Nouvelle France « Terre des Bretons » »

En hommage à nos « cousins » de la « Nouvelle France »

En souvenir des navigateurs, explorateurs, ainsi qu’aux personnes qui ont marqué l’histoire, comme le Général de Gaulle, qui a « mis les pieds dans le plat » (qu’il avait grands) à Montréal, sans conséquence irréversible. Son intervention a eu le mérite de faire connaitre le Québec, Saint Pierre et Miquelon et La Gaspésie, au monde entier.

En souvenir de l’Amiral d’Yves de Kersauson de Pennendreff qui fut mon commandant sur le Colbert. Ce croiseur est lié à tout jamais à l’histoire de la province du Québec.

Merci à Ian  Beaulieu qui a su nous raconter avec passion l’histoire de son « beau pays »,« Quel beau nom pour un aussi Beau lieu »

Merci aussi à Stéphane Duguay pour nous avoir fait parcourir tout le beau pays avec sa  « Chaudière,  jamais à cours de vapeur ».

Le Québec n’est pas une « Province » mais un « Pays » comme le chante si bien Gilles Vigneault, mais un pays qui n’est pas toujours l’hiver, contrairement à ce que pensait le roi de France, Louis XV , sa maitresse madame de Pompadour, et toute sa cour, au point de l’avoir abandonné en disant:  » Que voulez-vous que l’on fasse avec un champ de neige »…

En 1763, après la guerre de sept ans, il cède la « Nouvelle France », une partie de la Louisiane, quelques îles des Antilles à l’Angleterre, sans doute par manque d’argent, ses maitresses lui coûtent très cher…

Ce récit est également l’histoire de marins, pour la plupart bretons, pêcheurs, navigateurs et découvreurs , visiteurs qui partirent Cap à l’Ouest vers de nouveaux horizons.

Les premiers,  pour gagner leur pain, les seconds pour découvrir de nouvelles contrées et en ramener les richesses.

D’autres pour devenir célèbre, pour la gloire, la quête de liberté, pour laisser leur emprunte pour l’éternité. 

Les derniers en villégiature à la découverte du pays de nos cousins, nos ancêtres bretons ou originaires d’autres régions de France.

LA ROUTE DE LA MORUE

La route des pêcheurs bretons vers les « Grands Bancs »

A partir du XV ème siècle, et durant plusieurs siècles, des marins bretons ont pratiqué la pêche à la morue dans l’Atlantique du nord-ouest. Une activité nécessaire, qui a traversé des périodes pénibles et connu bien des drames.

Les pêcheurs bretons disaient :

« Ar bara zo ahont (a izel) » : le pain est là-bas.

Pour gagner leur vie et donc acheter le pain pour nourrir la famille il fallait aller là-bas, très loin,  à l’ouest vers la « Terre des Bretons ».

Histoire Maritime de la Bretagne au 16 ième siècle est intimement liée à celle du Canada.

TERRE AUX BRETONSUne partie du Canada s’est appelée tout d’abord « Terre des Bretons »,en particulier les terres limitrophes du golfe du Saint Laurent, l’Acadie, la Gaspésie, l’ île Saint Jean.

Acadie_1754Les basques quand à eux utilisent surtout Terre Neuve pour y installer leurs bases de ravitaillement en eau et produits frais qu’il échangent avec les indiens.

Avant les voyages  de Jacques Cartier, sur la carte du navigateur Jérôme de Verrazano de 1529, on peut voir l’écusson et les hermines du Duché de Bretagne sur les territoires de l’ancienne Acadie (Nouvelle Écosse, Nouveau Brunswick).

drapeau_amiraute bretonneLe drapeau des bateaux des flottes bretonnes était constitué d’une croix noire avec quatre carrés d’hermines, puis à partir de 1532, un seul carré est maintenu (celui du haut à gauche).

La Morue et la religion

En 1454, les habitants de l’île Bréhat et les moines de Beauport organisaient déjà la  pêche à à la morue sur les bancs de Terre-Neuve.

Aussi étrange que cela puisse paraître, la religion a également fortement influencée l’histoire bretonne de la pêche à la morue.

En ces temps-là, on ne badinait pas avec l’observation de l’abstinence alimentaire imposée, le vendredi,  et certains autres jours, par les commandements de l’Église.

On en comptait pas moins de cent cinquante jours dans l’année, carême compris.

Cette règle qui interdisait la consommation de viande causait, sur le plan pratique, de sérieux problèmes de nourriture à la population, principalement dans l’arrière-pays, où la présence du poisson de mer frais sur les tables était exceptionnelle.

Aussi les pêcheurs Bretons durent trouver des lieux de pêche prolifiques  de plus en plus loin vers l’ouest pour satisfaire les besoins de la population.

En ces temps-là, La morue était abondante entre la « Nouvelle terre »  et la « Terre des bretons ».

Dès qu’ils surent comment conserver le produit de leur pêche dans le sel, ils s’aventurèrent de plus en plus loin à l’ouest sur l’océan Atlantique.

En accostant dans les baies pour s’approvisionner en eau potable, ils firent connaissance des autochtones qui vivaient depuis plusieurs siècles ces contrées. Ce sont les amérindiens qui leur apprirent à sécher et fumer la morue.

Méthode de séchage et de fumage de la morue par les amérindiens de la tribu des Hurons.

Cette épineuse question du substitut à la viande étant réglée grâce aux apports des morutiers, avec le temps, une controverse s’ensuivit rapportée par les historiens. Il s’agissait, cette fois, de savoir qui des pionniers bretons avaient ouvert la route de Terre-Neuve.

Gravure de la ville close de Saint-Malo au XVII éme siècle

Il ne fait aucun doute que ce furent les marins Bretons originaires de Saint Malo ou des environs (Paimpol, Saint Brieux…) qui  accostèrent les premiers sur ces terres, car nombre de cap et de baies portaient les noms de Saint Malo, Saint Julien, Saint Lunaire, Boutitou… Les écrits du XV ème siècle plaident dans ce sens. Ils rapportent que la morue séchait partout sur les rochers et devant les cabanes à Saint Malo. Plus tard, vinrent les Basques, les Normands.

Certes, la pêche à la morue faisait le bonheur de la population bretonne, en dépit de la saumure qui coulait dans les ruisseaux et empuantissait l’atmosphère. Pour autant elle n’allait pas sans heurts avec les autochtones qui pratiquaient la chasse au « loup marin » (phoques) dans ces mêmes secteurs.

Les querelles entre les amérindiens (Micmacs, hurons, Iroquois) et les pêcheurs malouins, paimpolais et briochins tournaient parfois aux affrontements sanglants.

En 1610,  les morutiers de Saint-Malo se trouvèrent dans l’obligation de solliciter l’assistance de frégates royales pour assurer leur protection dans le contexte du conflit armé opposant alors la France à l’Angleterre au sujet de la « Nouvelle Terre » (Terre Neuve) de la « Terre des Bretons » (Gaspésie) et du Saint Laurent « la ou les eaux se ressèrent »  (Québec) , chacun revendiquant la possession de ces contrées.

Vaille que vaille, pourtant, l’armement morutier breton poursuivit son développement. Un recensement effectué en 1664 fait apparaître que Saint-Malo comptait à lui seul plus de 60 bateaux équipés pour cette pêche.

La pêche errante ou pêche à la morue verte

La pêche errante se pratiquait au large sur des navires à voiles de 30 à 100 tonneaux  sur les grands bancs. Les navires partaient pour une campagne de 6 à 7 mois avec des équipages de 20 à 30 marins.

Au tout début, les navires tiraient des lignes le long du bord à partir du pont. Au fil du temps, la technique évolua pour devenir plus performante.

Les navires embarquaient de petites embarcations appelées « doris » qu’ils mettaient à l’eau un fois arrivés sur les grands bancs.

Chaque doris était armé par deux hommes, un marin aguerri et un mousse. Le doris quittait le navire mère chacun dans une direction précise.

Avant de partir du bateau, le capitaine mettait dans son béret  8 numéros qui étaient tirés au sort. Il y avait des numéros à risque car dépendant des vents et des courants qui faisaient dériver « le bateau mère » et les doris plus ou moins vite et donc les  l’éloigner de leur base. En général les doris dérivaient plus vite, donc pour compenser cette fuite , les marins mouillaient une ancre flottante qui devait freiner la dérive.

L’ancre flottante était constituée d’un entonnoir de toile de jute qui était mis à l’eau à l’avant du navire. l’entonnoir se remplissait d’eau et constituait un poids mord que le bateau devait trainer ce qui freinait la dérive.

La pêche se faisait avec une ligne composée de un ou plusieurs hameçons, genre de « mitraillette » à maquereaux. L’appât était constitué de bulots ou de sardines conservés dans de la saumure. Ils restaient toute la journée à pêcher et devaient rentrer avant la nuit. Parfois, le doris étant plein de morues, menaçant de sombrer, le retour était nécessaire.

Beaucoup de drames eurent lieu pour différentes raisons. Beaucoup de doris se perdaient dans l’immensité de l’océan, la brume s’étant levée, ou sombraient car la mer s’était formée. Il arrivait parfois que l’un des marins tombe par-dessus bord et coulait à pic, ne sachant pas nager avec des vêtements alourdis par l’eau. Parfois encore le doris chavirait entraînant ses deux occupants qui n’avaient aucune chance dans ces eaux glacées.

De nos jours encore, pour gagner son pain,  « bara », en Bretagne, il faut aller pêcher.

Cette conviction perdure fortement dans le pays bigouden.

Un  armateur du Guilvinec a baptisé tous ses navires  un nom qui commence par « bara ».

Le tout nouveau  « Bara ar Vicher » (le pain  professionnel , de son métier)

Le « Bara Brenn » (le pain au son) se refait une beauté sur l’aire de carénage.

« Yann,  le bigouden,  est parti un beau matin

Embarqué sur un trois mats malouin,

Cap à l’ouest,  vers l’Alaska,

Pêcher la morue pour gagner son « bara ».

Mais il ne sait pas, si au pays il reviendra ».

LA ROUTE DES NAVIGATEURS

En 1497, Giovanni Caboto (Cabot), un génois au service du roi Henri VII, d’Angleterre, part vers l’ouest avec 18 marins sur le galion le « Mathew ».

Il découvre les côtes de « Newfoundland » (Terre Neuve) et navigue tout au long des côtes de Terre Neuve et de Gaspésie. Il donnera son nom à ce type de navigation le long des côtes: « le cabotage ».

Jacques Cartier

Jacques Cartier est né le 23 décembre 1491 à Saint Malo.

En 1534, Jacques Cartier quitte Saint Malo avec deux vaisseaux, après vingt jours de mer, il touche la terre dans une baie qu’il nomme la « baye à chaleur » (baie des chaleurs) en raison de la brume qui s’en échappe comme s’il y avait évaporation due à la chaleur des eaux. Il prend contact avec les autochtones, des amérindiens de la tribu des Micmacs. Les Micmacs appelaient cette baie « Mowebaktabaak » (grande baie).

Puis il remonte vers l’ouest et jette l’ancre à « Gaspé » havre connu par les pêcheurs bretons, qui donnera son nom à la Gaspésie.

Arrivée au Québec  en 1535

Le deuxième voyage a lieu après 1535.

Cette expédition compte trois galions:

La « Petite Hermine » de 60 tonneaux,

l’ « Émerillon » de 40 tonneaux,

la « Grande Hermine » de 120 tonneaux.

Grâce à leurs connaissances du premier voyage, Jacques Cartier remonte alors le Saint Laurent, découvrant qu’il navigue sur un fleuve lorsque l’eau devient douce. Il fait escale à l’île d’Orléans.

Le troisième voyage de Jacques cartier en 1541 est un voyage à la recherche des richesses de ce nouveau pays. Il ramène de la région de Saguenay de l’or et des diamants.

Aussitôt arrivé en France, il fait expertiser le minerai, apprenant qu’il ne rapporte que de la pyrite  et du quartz, sans valeur.

 » L’or des fous »

La pyrite aussi appelé « or des fous » à cause de sa couleur jaune ressemblant à de l’or. Elle  a égaré des prospecteurs peu compétents croyant avoir découvert des pépites d’or.

La mésaventure de Jacques Cartier est à l’origine de l’expression:

« faux comme des diamants du Canada »

Et du nom de:

« Cap Diamant » pour désigner l’extrémité du promontoire de Québec.

Jacques Cartier se retire dans son manoir de « Limoëlou » à Rothéneuf près de Saint-Malo.

rotheneufLe modeste manoir de Limöleou fut la demeure de Jacques Cartier au quinzième et seizième siècle.

Le manoir fut sauvé par la fondation canadiènne Macdonald Stewart.

Il décède en 1557. Il repose depuis dans la cathédrale de Saint Malo.

Rothéneuf est devenu célèbre grâce à Jacques Cartier mais également grâce à l’abbé Adolphe Fouré qui passa une grande partie de sa vie à sculpter les rochers entre Rothéneuf et Cancale.

L’abbé sculpteur

abbé fouréAdolphe Fouré est ordonné prête à Rennes. A la suite d’une attaque cérébrale, il devient sourd et muet. L’abbé se retire à Rothéneuf ou il sculptera plus de trois cents personnages, nobles, pirates et corsaires de Saint Malo, mais aussi des êtres fantasmagoriques évoquant les gargouilles des cathédrales médiévales.

Rochers de RothéneufSamuel de Champlain

Samuel de Champlain est né à la Rochelle, en 1569.

Après une formation de navigateur, il est soldat au service de la  Bretagne.

Il est surtout connu pour avoir ensuite fondé la ville de Québec, le 3 juillet 1308.

N’appartenant pas à la noblesse, Champlain agit en tant que subalterne d’un noble désigné par le roi.

A Québec, en tant que roturier, il n’ est que « lieutenant » du vice-roi de la Nouvelle France.

Jamais il n’obtiendra le titre officiel de gouverneur, même s’il en exerce les fonctions .

Samuel de Champlain fut considéré  le « Père de la Nouvelle-France ».

LA PROVINCE ENDORMIE DEVIENT UN PAYS

LA ROUTE DE LA FRATERNITÉ

Voici l’histoire du périple du croiseur Colbert qui appareilla de Bretagne le 15 juillet 1967 cap à l’ouest vers la « Nouvelle France » (le Québec) à l’occasion de l’Exposition Universelle.

Le Général de Gaulle, Président de la République avait répondu positivement à l’invitation du gouvernement de la province du Québec et il avait tenu à honorer de sa présence à cette manifestation organisée à Montréal. Cette exposition revêtait encore plus d’importance aux yeux du général car le thème choisi était « Terre des hommes » de l’ouvrage de Saint-Exupéry.

La France avait fait un gros effort pour construire un magnifique pavillon. Une structure en forme de diamant serti, conçu par l’architecte visionnaire Iannis Xennakis. D’origine grecque, réfugié politique en France en 1947 et naturalisé français, il a travaillé comme ingénieur pour Le Corbusier. Xennakis est décédé à Paris en 2001.

La structure perdure encore de nos jour car le pavillon a été transformé en un magnifique casino sur l’île Notre-Dame.

Le pavillon des États-Unis, une énorme biosphère, conçue par l’architecte Richard Bukminster est également visible sur l’île Sainte-Hélène.

Ce récit est émaillé de témoignages des participants de l’époque ainsi que d’anecdotes recueillies à chaud, ou bien plus tard, sur le croiseur Colbert.

Le croiseur lance-missiles Colbert

Le Colbert est le sixième bâtiment à porter le nom de l’illustre Ministre de la Marine de Louis XIX, Jean-Baptiste Colbert.

La construction du croiseur débute à Brest en 1953, mis à l’eau en 1956, il est admis au service actif en 1957. Affecté comme bâtiment Amiral de l’escadre de la Méditerranée, il rejoint Toulon son port d’attache en 1959.  A l’origine croiseur anti-aérien (C.A.A.), il sera transformé durant l’année 1960 en croiseur lance-missiles (C.L.M.).

Caractéristiques du croiseur:

D’une longueur de 180 m, largeur : 20 m et d’un tirant d’eau : 7.9 m, il déplaçait 11 000 tonnes de port en lourd.
Propulsé par une machine à vapeur  de 86000 CV. Sa vitesse maximum était de 32 nœuds ce qui est remarquable pour une telle masse.

Je me souviens du récit, émaillé d’ anecdotes, raconté par le capitaine de vaisseau de Kersauson de Pennendreff, dernier commandant du Colbert, lors d’un dîner au carré de l’Amiral en compagnie du second, le capitaine de frégate Gilbert et du capitaine de corvette Musso, un soir d’été 1990 en mer d’Oman.

Avant de passer à table, je demande au commandant la permission de me rendre aux toilettes. Le commandant me dit : « Faites, mon cher Quideau,  allez donc visiter le bidet de Tante Yvonne ! ».

Quel ne fut pas mon étonnement que de constater de visu qu’il y avait bien un magnifique bidet dans le cabinet de toilette de l’Amiral.

Ce n’était pas le bidet en bois de hêtre de Madame de Pompadour qui l’utilisait déjà en 1710 à Versailles, sous Louis XV, mais un bidet en porcelaine blanche made in France de Christophe des Rosiers.

Le bidet de « la Pompadour »

A mon retour, je demande au commandant le pourquoi de cette présence insolite sur un navire de guerre.

Le commandant de Kersauson de se fait pas prié et commence à raconter le périple du Colbert au Québec en 1967.

Le bidet ainsi que d’autres aménagements avaient été spécialement réalisés pour le voyage du Général de Gaulle pour l’Exposition Universelle de Montréal. L’épouse du Président (Tante Yvonne) était aussi du voyage.

Nous passons à table et la conversation continue sur ce voyage dont voici les grandes lignes.

Les buts de ce voyage sont culturels et….politiques

En mai 1967, Daniel Johnson, alors ministre de la province du Québec est en visite officielle à Paris pour inviter dans un « but culturel » le Général de Gaulle à l’exposition Universelle de Montréal pour «Permettre aux Canadiens français de se découvrir et au reste du Canada de se réveiller à la réalité française».

Daniel Johnson est né le 15 avril 1915 en Estrie, il est décédé le 26 septembre 1968 peu de temps après la visite de de Gaulle au Québec.

Daniel Jonhson et le général de Gaulle

Johnson ajoute:

«Ce qui me réjouit, c’est que nos gens vont se rendre compte qu’il est possible de vivre en français au Canada, je voudrais que le général fasse sentir aux Québécois le sens de la culture française».

Le deuxième objectif de Johnson est plus « politique » que culturel, il consiste à persuader de Gaulle de franchir l’Atlantique pour livrer le message suivant à Ottawa, et au monde entier qu’il y a aussi:

« Des Canadiens français, qu’il faut les respecter, et ce respect commence par l’égalité politique».

Il s’agit de secouer les mentalités et en même temps, de contrer la politique séculaire du gouvernement fédéral d’Ottawa qui masque le caractère français du Québec.

Combien de chefs d’État et de diplomates étrangers visitant l’Exposition diront au premier ministre du Québec:

«Nous nous excusons de n’avoir rien préparé en français. Nous ne savions pas qu’on parlait français ici. L’ambassadeur du Canada ne nous l’avait pas dit».

Le général, a bien pris note de cette réalité anglophone et rendra la pareille à certains officiels dès son arrivée dans le golfe du Saint Laurent.

La préparation au voyage, les aménagements effectués sur le croiseur

Le général, d’abord réticent à l’idée d’aller visiter l’Exposition Universelle de Montréal de 1967, fut finalement séduit par l’idée de s’y rendre en traversant l’océan sur un bâtiment  jusqu’à Québec, puis en remontant la vallée du Saint Laurent par la route comme le firent avant lui Cartier et Champlain. Un argument supplémentaire fut d’arriver ainsi Outre-Atlantique par un moyen de transport français, alors que par air, il aurait du emprunter un avion forcément américain (Boeing  ou Mac Donnell Douglas ). Le Colbert fut aménagé pour recevoir le Président de la République et son épouse Yvonne, en particulier les appartements de l’Amiral furent agrandis.

C’est « Tante Yvonne » qui a supervisé sa décoration. Elle avait fait embarqué des meubles du Mobilier National, des toiles de Dufy et Matisse, et avait demandé qu’on lui rajoute deux fenêtres autour de la cheminée. C’est pourquoi  le Colbert est le seul bâtiment de guerre, doté de deux fausses fenêtres qui encadrent une cheminée, fausse elle aussi.

Le terme « appartements » pourra sembler étrange à certains d’entre vous, mais il est d’usage dans la marine de parler d’appartements de l’amiral. Et c’était le cas pour le croiseur Colbert qui était avant tout un navire de commandement devant recevoir un amiral et son État-major.

Les appartements comprenaient un cabinet de travail avec un bureau en acajou, un salon et une salle à manger avec un office adjacent pour le maître d’hôtel, et une grande chambre avec son cabinet de toilettes.

Le lit dans l’appartement de l’Amiral fut agrandi. Les cabinets de toilette furent féminisés avec ce fameux bidet. Le téléphone secret rouge, et un autre noir en bakélite furent connectés au PC radio.

Une petite salle à manger avait été aménagée pour le commandant du Colbert, le capitaine de vaisseau  Delahousse et l’État-major particulier du Général dans un local situé dans la coursive de l’amiral.

De ce voyage, il restait encore en 1991,  le téléphone qui reliait le général de Gaulle à l’Élysée (ce combiné rouge était toujours présent, dans la chambre de l’amiral).

Cap à l’ouest, la traversée de l’Atlantique nord

Le 15 juillet, de Gaulle embarque avec son épouse à bord du croiseur Colbert à Brest.

Ce moyen de transport fut délibérément choisi pour lui permettre d’éviter le protocole qui commandait l’arrivée via Ottawa. Ayant été invité par le premier ministre du Québec, Daniel Johnson, plutôt que par le premier ministre canadien, Lester Pearson, il ne pouvait être accueilli en premier lieu dans la capitale fédérale.

Au cours de la traversée, il aurait dit à ses proches :

« Je compte frapper un grand coup. Ça bardera, mais il le faut. C’est la dernière occasion de réparer la lâcheté de la France. »

Le Colbert fit escale à Saint Pierre et Miquelon le 20 juillet 1967.

Le commandant de Kersauson, après le plat principal,  continue cette l’histoire qui me passionne au plus haut point ainsi que les autres membres présents ce soir-là.

Après cette escale, le Colbert mis le cap à l’ouest et arriva à l’embouchure du Saint Laurent le 22 juillet ou un officier de liaison envoyé par le gouvernement fédéral embarqua à bord.

Ottawa,  avait bien pris le soin de désigner un officier ne parlant que l’anglais, pas un traitre mot de français,  pensant que cela obligerait les français à s’exprimer dans la langue de Shakespeare. C’était bien mal connaitre le général, qui avait beaucoup apprit des pratiques de la « perfide Albion » pendant son séjour en Angleterre.

De Gaulle l’invita à tous les repas à sa table et bien sur la conversation ne se fit qu’en français. Les rires fusaient parfois. Par politesse, l’officier riait aussi, par politesse comme il se doit pour un officier de marine, ne sachant pas le pourquoi de ces rires. S’il avait su, ……………il n’aurait certainement pas ri autant.

L’anse-aux-foulons, arrivée à Québec

Le dimanche 23 juillet,  par un beau soleil, le Colbert s’amarrait au pied de la citadelle de Québec à l’anse au Foulon.

Le Colbert abhorre les  pavillons français et québécois. Sur le quai, de Gaulle est reçu de façon protocolaire par le gouverneur général Michener, représentant le gouvernement fédéral canadien et par le premier ministre du Québec, Johnson.

de gaulle colbertTandis que la  » Marseillaise » soulevait une vive ovation, le « God save the Queen » provoquait aussitôt quelques huées et des tomates tombaient des collines sur les participants.

de Gaulle au Quebec 1967Après une courte escale à la citadelle,  résidence du gouverneur général, de Gaulle et Johnson se rendent à l’Hôtel de ville. Le président déclare alors :

«Toute la France, en ce moment, regarde par ici. Elle vous voit. Elle vous entend. Elle vous aime…». « Nous sommes liés par notre avenir. Mais on est chez soi, ici, après tout ! Ce que nous faisons ici et là-bas, nous le faisons toujours un peu plus ensemble. Toute la France, en ce moment, regarde par ici. Elle vous voit. Elle vous entend. Elle vous aime. ».

Puis, le président assiste à une messe à la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré, dite par l’archevêque de Québec, Maurice Roy.

Le chemin du Roy, de Québec vers Montréal

Le Chemin du Roi, inauguré le 5 août 1734, relie Québec à Montréal en suivant la rive gauche du Saint-Laurent.

Tout au long des 270 kilomètres du parcours, il y avait des emblèmes français et québécois partout. Le cortège roulait sur un tapis de fleurs de lis blanches peintes au pochoir sur l’asphalte.

Il traversa et s’arrêta à :

Donnacona, La Pérade

La Pérade est célèbre pour ses pêcheries en hiver sur le lac gelé

la peradeDéjeuner au séminaire Saint Joseph de Trois-Rivières

seminaire st joseph de trois rivièresPhoto de l’association « Point du Jour Aviation »

Louiseville, Berthierville, Repentigny, Pointe-aux-Trembles.

À l’entrée de chaque village, il y avait l’écusson de la province française d’où étaient originaires ‘les habitants. Si Jacques Cartier et Samuel de Champlain, venaient de Bretagne, La France toute entière a contribué à peupler ces territoires. Sur le Chemin du Roi, c’est toute la vieille France qui acclamait le Général.

A chaque étape de Gaulle déclamait sous les acclamations :

« Maintenant, je vois le présent, le présent du Canada français, un pays qui est en train de devenir maître de lui-même, qui prend en mains ses destinées. Vous pouvez être sûr que le vieux pays, que la vieille France apporte et apportera à la Nouvelle-France tout son concours fraternel »…

Le 24 juillet sur le balcon de l’hôtel de ville de Montréal

« les pieds dans le plat, la phrase au bout du fil… »

Sur le balcon de l’hôtel de ville de Montréal, de Gaulle, exalté par l’enthousiasme de la foule, s’empare des micro, malgré les réticences du maire,Jean Drapeau, qui rétorque qu’il qu’il n’est pas branché.

Une voix venue de derrière le général dit: « je sais comment le faire marcher » .

Aussitôt connecté,  de Gaulle prend la parole et de sa voix de stentor déclame:

« Vive Montréal ! Vive le Québec ! Vive le Québec libre ! Vive le Canada français et vive la France ! « 

Cette phrase fatidique et impérissable, déchaîna les passions, une clameur immense envahie la place et de Gaulle les bras levés en » V », les points serrés, salua la foule.

Qu’est devenu le quidam qui a osé connecter le micro? il aurait du aussi être reconnu pour sa réactivité et son audace…On ne le saura jamais. Dommage…

La visite officielle fut donc écourtée, de Gaulle renonça à se rendre à Ottawa.

Le 25 juillet à Montréal, après une réception de la colonie française au Ritz Carlton, de Gaulle  visite de l’exposition universelle, quand même, il était venu pour cela.

expo 67Le général reprit l’avion ( un D.C. 9) pour Paris dans l’après-midi du 25 juillet après avoir pris congé du maire de Montréal,il lui dit:

« Pendant mon voyage, du fait d’une sorte de choc, auquel ni vous ni moi ne pouvions rien, c’était élémentaire, et nous en avons tous été saisis , je crois avoir pu aller en ce qui vous concerne au fond des choses, quand au reste, tout ce qui grouille, et grenouille, et scribouille, n’a pas de conséquence historique dans les grandes circonstances ».

Une tension diplomatique s’établit entre la France et le Canada.

Lester Pearson, premier ministre du Canada, considère ces propos comme un affront, ce qui a entraîné l’annulation de la visite que devait faire le général à Ottawa, et son départ précipité pour la France.

Cependant, lors d’une conférence de presse le 27 novembre 1967, de Gaulle déclara:

«Que le Québec soit libre c’est, en effet, ce dont il s’agit. Cela aboutira forcément, à mon avis, à l’avènement du Québec au rang d’un État souverain, maître de son existence nationale, comme le sont par le monde tant et tant d’autres peuples, tant et tant d’autres États, qui ne sont pas pourtant si valables, ni même si peuplés, que ne le serait celui-là.»

Le commandant de Kersauson précise que toute cette fameuse histoire a été raconté par les officiers français ayant participé à ce voyage et en particulier par  le capitaine de vaisseau Delahousse commandant le Colbert. Il y avait également du voyage, l’Amiral Philippon,  Chef de cabinet à l’Élysée, et l’aide de camp du Président le capitaine de vaisseau Flohic.

La Vénus du Croiseur Colbert

Ce magnifique tableau trônait dans le salon du carré des officiers du croiseur Colbert.

salon du carré du colbertLa salle à manger des officiers subalternes du croiseur Colbert

carre du colbert2Le tableau était accroché sur la cloison, à droite en rentrant, face au petit bar. Dans le coin sur une tablette, il y avait aussi une magnifique lampe chinoise que j’ai eu la chance de gagner à la tombola organisée lors du partage des biens de la « gamelle » du carré, bien sur lampe non-inscrite au patrimoine.

La salle à manger des officiers supérieurs du croiseur Colbert

CARRE DU COLBERTOn ne voyait que cette toile, lorsque l’on prenait au bar du carré. Elle ne pouvait pas passer inaperçue et suscitait bien des interrogations et on le verra plus tard des convoitises.

Lorsque j’étais Officier Détecteur sur ce fier vaisseau, en 1990 et 1991, je me posais la question :

Comment cette toile était arrivée là ? , qui l’avait peinte ?

Aucun officier du bord  ne connaissait la réponse exacte.

Certains disaient qu’elle avait été peinte par un ancien officier du bord qui avait pris pour modèle sa petite amie. Que nenni…fadaises….

Jean Rouffignac ancien officier sur le Colbert donne une version qui est la plus plausible :

 » Lorsque j’étais adjoint-missiles à bord du Colbert, nous avions comme info que ce tableau avait été donné par Domergue en remerciement des nombreux repas qu’il avait pris à bord du croiseur à Toulon. Elle aurait été un de ses modèles. On disait que c’était la propriétaire d’un beau restaurant-bar au coin du petit port de pêche du Mourillon.

Quand le croiseur Colbert fut désarmé, en 1991,  le président des officiers du Cassard, vint à bord mettre une option sur la toile. Comme elle ne rentrait pas dans l’inventaire officiel du patrimoine de la marine, elle lui fut attribuée par notre président. Depuis elle continue à  faire fantasmer les  officiers mais…. sur la frégate Cassard.

Il est vrai que cette toile est caractéristique d’autres toiles de femmes au buste dénudé que Jean Gabriel Domergue aimait peindre, comme celle intitulée « Fleur du Nord » mise en vente chez Christie’ s entre 7600 et 11000 dollars.

Il aimait peindre de jeunes artistes assez fluettes , ce n’est sans doute pas la propriétaire d’un bar du Mourillon, mais plutôt une danseuse de cabaret.

Quoiqu’il en soit, les toiles de Jean-Gabriel Domergue sont actuellement très recherchées et la « Vénus du Colbert » doit valoir maintenant son « pesant d’or ».

Jean-Gabriel Domergue

Le peintre est né à Bordeaux le 4 mars 1889  et il est décédé à Paris en 1962.
Il était le petit cousin de Toulouse-Lautrec.

Jean-Gabriel Domergue achète un terrain à la Cannes en 1926. Il conçoit, et fait réaliser la villa, sous le nom de « villa Fiesole ».  

villa domergueIl est très influencé par le style italien de la renaissance, et par une villa qu’il avait vue à côté de  Florence.

Son épouse, Odette Domergue, conçoit des jardins méditerranéens, les bassins et les cascades agrémentés de statues antiques.

Le couple réside ans la villa à partir de 1932 jusqu’à la mort du peintre en 1962.

Dix ans plus tard, Odette Domergue lègue la propriété à la ville de Cannes.

La villa accueille toujours des évènements mondains ou des manifestations officielles de la ville et est ouverte pour des expositions artistiques.

villa domergue 2Depuis les années 1990, la villa est l’endroit où se réunit le jury officiel du Festival de Cannes pour la délibération finale des  « palmes d’or ».

palais de cannesIl disait :

« Les femmes ne trouvent leur portrait ressemblant
que lorsqu’il ressemble à ce qu’elles voudraient être
»

domergueIl ne fait plus aucun doute, le tableau de la femme aux seins nus qui trônait au carré des officiers du croiseur Colbert et qui a été cédé aux officiers  de la frégate anti-aérienne Cassard est bien de Jean Gabriel Domergue. Quand au modèle le doute subsiste ?

Cette toile compte tenu de sa valeur devrait être inscrite au « Patrimoine de la Marine ».

La dernière mission du Colbert

« Salamandre »

Opération "Salamandre" après l'invasion du Koweït par les troupes irakiennes.Photo SCPA-D ( Colbert-Var-Clemenceau)

Le navire à bien tenu son rôle de « chien de garde » du porte-aéronefs Clemenceau lors de la mission « Salamandre ».

colbert proue poupeSalamandre, pourquoi ce terme pour la mission de l’été 1990 dévolue au croiseur « Colbert » et à ses partenaires, le porte-avion « Clemenceau » et le pétrolier ravitailleur « Var » ?

La salamandre était l’emblème de François 1er dont la devise était : « Nutrisco et extingo » (Je me nourris du feu et je l’ éteins).

IMG2_0003Le Colbert avait souffert quand il a accosté à Toulon après cette éprouvante mais passionnante mission en mer d’Oman et en Mer Rouge.

IMG2_0009Les taches de rouille sont bien visible sur la coque du croiseur

CO ColbertPar contre après un lifting, Il avait belle allure lors de sa dernière escale le 12 avril 2012 à Venise au quai des Martyrs près de la place Saint Marc.

Pendant cette dernière mission nous avions à bord, Serge Marko « Peintre Officiel de la Marine ». 

Superbe aquarelle de Serge Marko « le Colbert à Venise »

Sur la route du retour, vers Toulon, le Colbert participa avec brio à l’exercice « Sardinia » exercice avec la Force Navale de Méditerranée. Certains officiers de l’État-major en furent même offusqués de s’être fait « grugé » par la tactique employée par le staff opérations du vieux croiseur. Ils ne se doutaient pas qu’ en Corse,  « prendre le maquis » est un institution lorsque l’on vous recherche. Le Colbert fut introuvable, même par les Super-Étendards.

Mais ceci est une autre histoire…

Les aussières passées, le commandant de Yves de Kersauson ordonna « terminé barre et machine ». Dans les entrailles du navire, « le Chef », la larme à l’ œil, répercuta l’ordre à ses mécaniciens, lui qui était si fier de l’état irréprochable de ses machines devait à contre cœur s’en séparer (il assura toutefois  l’intérim du commandement  jusqu’au départ du Colbert vers Bordeaux), piètre consolation qui ne durera pas très longtemps.

Avant de quitter de quitter le Colbert, les comptes de « la gamelle » sont clôturés.

La gamelle est une allocation pécuniaire attribuée aux différents carrés pour leur permettre d’améliorer l’ordinaire.

Le « coqueron » doit être rendu vide. Le coqueron sur un navire de guerre est le nom donné à la cave ou sont stocké les bouteilles de vin.

Avant de se séparer une sortie fut organisée par le carré des officiers sur la jonque « La Dame de Cantons ». Le coqueron fut asséché au cours d’une journée mémorable.

Le croiseur fut désarmé le 24 mai 1991.

Le 12 juin 1993, après avoir été remorqué de Toulon à Bordeaux, il est transformé en musée flottant au quai Bacalan près de la place des Quinconces.

En mai 2007, Le croiseur fermé au public est transféré à Brest.

.

Depuis juin 2007, il rouille au cimetière marin de Landévennec.

La tape de bouche du Colbert

Sur la « tape de bouche » du croiseur figure la couleuvre ondoyante du blason de la famille Colbert.

Pourquoi une couleuvre ? Couleuvre en latin se dit: « COLUBER ».

tape de boucheUne vidéo de Alexandre Gerbier sur le croiseur lance-missile Colbert

http://www.youtube.com/watch?v=RkQf30OS3AQ

enveloppe colbert

dix francs colbertLA ROUTE DU RETOUR VERS NOS « COUSINS D’AMERIQUE

Avec mon épouse, nous voulions à tout prix connaitre le pays de nos cousins canadiens et plus particulièrement ceux du Québec. Ce fut chose faite en septembre 2012.

Le départ vers l’ouest s’effectuera en AIRBUS A 380

Un petit clic sur le lien ci dessous vous permettra de visiter le cockpit de l’ A 380.

le cockpit de l’Airbus A 380

Le bel oiseau se prépare pour la traversée

L’embarquement à bord s’effectue  sans problème malgré les 550 passagers

Bienvenue à bord de l’ A 380

La cabine

L’intérieur de l’A380 est très impressionnant

Décollage en douceur de l’ A 380

Décollage en direct vu par les trois caméras de bord (arrière, avant, dessous)

La route vers l’ouest ne s’effectue plus en 20 jours, comme pour les voyages de Jacques Cartiers mais en moins de 8 heures à 11 000 mètres d’altitude.

En vue de la nouvelle France au Sud de Saint Pierre et Miquelon

Comme « l’Oiseau Blanc », la route parcourue par l’ Airbus A 380 fut une route orthodromique

L' »Oiseau Blanc » fut le surnom donné au « Spirit of Saint Louis », l’avion avec lequel Charles Nungesser et son navigateur François Coli tentèrent la première traversée de l’Atlantique en 1927. Ils disparurent en mer le 8 mai 1927, probablement au sud de Terre-Neuve (à la position de l’Airbus A 380 sur la photo).

Charles Nungesser et François Coli

Le « Spirit of Saint Louis » dans la tempête

L’orthodromie désigne le chemin le plus court entre deux points de la terre, c’est-à-dire un arc de cercle qui passe par ces deux points. Pour les navigateurs, la route orthodromique est la route la plus courte à la surface du globe terrestre. C’est la  distance dite « à vol d’oiseau ».

La loxodromie est une trajectoire constante, c’est une ligne droite. Elle ne représente pas la plus courte distance entre deux points, car la terre est ronde.

carte orthodromie loxodromieLa route orthodromique,  en rouge . La route loxodromique en bleue.

Grâce à notre guide et conteur hors pair Ian Beaulieu et à son compère « driver de Chaudière », Stéphane Duguay. Nous avons parcouru la belle province  bien installé à bonne température  dans la « Chaudière » et nous nous sommes imprégnés tout au long de ce parcours des histoires de ces pionniers venus de de Bretagne et des quatre coins de  France.

Voici en quelques images commentées tout au long de la route de la « chaudière » .

« Bretons, Normands, Vendéens, sont partis Cap à l’Ouest bravant les tempêtes pour découvrir un nouveau monde, des étendues vierges et sauvages et des populations dubitatives face à ces envahisseurs qu’ils ne connaissaient pas ».

A l’arrivée dans le golfe du Saint Laurent, les pionniers ont aperçus les cétacés et les otaries venir se nourrir de plancton et de petits poissons qui pullulent dans les courants devant le fjord du Saguenay.

La petite ville de Tadoussac (Toutouskak) « les deux mamelles » et son illustre hôtel

Le célèbre « café du fjord » avec sa charmante hôtesse « Marie-Ange »dite:

« Miss Caribou »

Le « Café du Fjord » rue du « Bateau Passeur » à Tadoussac

Les rorquals communs et les baleines bleues  font un petit tour en surface puis replongent pour se nourrir.

Les explorateurs ont eu également à faire face à la faune locale, en particulier les ours noirs, les ours blancs, les bisons, les bœufs musqués, les caribous et bien d’autres espèces locales.

Les ours noirs et bruns (grizzlis) ainsi que de nombreux animaux sauvages sont en totale liberté dans l’immense réserve de Saint Félicien près du lac Saint-Jean dans la province de Québec.

Ce sont les humains qui rendent visite aux animaux sauvages, dans des cages.

Les bisons , buffles, caribous et autres quadrupèdes vaguent librement indifférents aux bipèdes qui viennent les visiter.

Les pionniers qui se sont implantés ont su tirer parti de ces ressources animales pour se nourrir et pour faire du troc avec les amérindiens. Le commerce des fourrures fut tout de suite prospère (renards, lièvres, loups et surtout martres et castors).

La martre était et est toujours très recherchée pour ses poils très souples qui servent à la confection des pinceaux. Les pinceaux en polis de martre ont une pointe parfaite et un pouvoir de rétention d’eau qui en font les meilleurs pinceaux pour l’aquarelle.

martreLa peau de castor est surtout utilisée pour la fabrication de chapeaux en feutre et sa fourrure pour toutes sortes de vêtements dont les manteaux.

Plus tard, ils ont utilisé les ressources naturelles du pays, surtout le bois dans les immenses forêts pour la construction de maisons et de bateaux.

Il ont su tirer parti de  l’érable, arbre emblématique du Canada,  pour en extraire la sève et confectionner bon nombre de produits dérivés du sucre.

Les petites exploitations sont légion autour de Québec.

Sur le chemin du Roy, au 1447 de la petite bourgade de St Pierre sur la très belle île d’Orléans, arrêtez vous à la cabane à sucre de l’ En-Tailleur pour une escale gustative des produits locaux. Vous y serez accueillis en « cousins » dans une ambiance familiale chaleureuse « country rétro ».

CIMG1676Dans la boutique, les deux charmantes sœurs québecoise de la « cabane au Canada », Lise et Véronique, vous ferons goûter tous les produits à base de l’érable.

N’oubliez pas de gouter à la tire d’érable ou la tire à la neige

en tailleurLe sirop d’érable est chauffé jusqu’à ébullition puis déposé directement sur la neige ou la glace. Le sirop durcit pour devenir une succulente sucette.

salle des paysan entailleurSite de la cabane à sucre  :http://www.entailleur.com/

restaurant l'entailleurEn plus de la faune sauvage qui pullulait dans des forêts , les explorateurs ont du franchir des espaces naturels, des rivières et les lacs immenses.

la voie maltée 3la voie maltée 4Vous n’aurez que l’embarra du choix dans la voie Maltée

la voie maltée5La brasserie/restaurant la « Voie Maltée » située à Chicoutimi est un lieu convivial ou « il n’y a pas de malt à se faire du bien ».

Les chutes majestueuses comme celle de Montmorency à Québec et Niagara dans l’Ontario mais aussi des lacs gigantesques comme des mers.

La chute Montmorency près de la ville de Québec

niag1La chute canadienne en fer à cheval du Niagara

la chute américaine

niag3NIAG4niag5niag6

Niagara « by nigth »

niagara by nigthniagara9LA CAMPAGNE DU NIAGARA

GUERRE DE 1812fort georgeniagar on the lake2niagara on the lake3CROISIÈRE SUR LE LAC ONTARIO

mille ilesles îles du lac Ontario

Le lac Ontario et ses « milles îles »

Les pionniers ont su fraterniser avec les amérindiens pour fonder une nation et construire un « Beau Pays » dans l’entente et le commerce.

Malheureusement, les « Tuniques Rouges » alliées avec certains « Peaux Rouges » (les iroquois) sont venus pour annihiler tous les efforts entrepris, chasser les populations, mettant les autres sous leur joug. Le roi de France a laissé faire, les abandonnant à leur sort.

Reproduction de la bataille des plaines d’Abraham le 13 septembre 1759 sur le lieu actuel.

Plan de la bataille des plaines d’Abraham

Les deux généraux, Louis Joseph marquis de  Montcalm  le français, et James Wolfe l’anglais,  furent blessés durant la bataille et succombèrent de leurs blessures.

Montcalm mourant, demanda à son chirurgien :

« Combien de temps me reste-t-il à vivre ? »
« Quelques heures à peine »
« Tant mieux, je ne verrai pas les anglais dans Québec »

Sa devise était : « Mon innocence est ma forteresse ».

James Wolfe était sans pitié et il semait la erreur dans tout le pays.

Dans un manifeste il a écrit:   » je me propose de l’incendier par nos tirs de boulets, de détruire les récoltes, les maisons et le bétail, tant en aval qu’en amont, d’exiler le plus grand nombre possible en Europe, et de ne laisser derrière moi que famine et désolation; mais nous devons apprendre à ces crapules à faire la guerre d’une manière qui soit plus digne de gentilshommes ».

« Wolf » n’épargnera aucune ferme en aval de Québec sur les deux côtés du Saint-Laurent. Ceux qui lui résistèrent furent tués, les autres pendus.

C’était sans aucun doute, pour « Wolf », des manières de gentilshommes…qui bien sur n’avaient rien de gentils… Il ne devait pas connaitre la traduction française du mot « gentilhomme ».

« un loup (il portait bien son nom) rouge comme sa tunique, couleur sang »

La place forte et la ville de Québec fut prise par les britanniques 4 jours plus tard.

Le château Frontenac à Québec, photos Hélène Quideau

Beaucoup d’années se sont écoulées….dans l’oubli et l’ignorance. Les français de métropole avaient complètement oubliés leurs cousins du Québec, de l’Acadie et des autres colonies « francophones » du Canada passées sous le joug britannique.

« Heureusement, un général venu de France a réveillé un peuple soumis, en leur disant haut et fort de se redresser, de ne plus courber l’échine et d’être fier de leurs origines ».

la plus ancienne maison de quebecDe nos jours, la vieille ville de Québec, qui a connue les premiers colons, toujours enserrée entre ses fortifications percée de portes monumentales, est pleine de charme.

PORTES QUEBECL’architecture ne m’est pas inconnue car à certains endroits elle me fait penser à celle de l’ancien Toulon dont malheureusement il ne reste pratiquement plus rien si ce n’est la porte d’Italie, la porte Royale, la porte Malbousquet et les forts qui protégeaient la rade (le fort Saint-Louis, la Tour Royale, le fort Balaguier et celui de l’ Eguillette).

portes toulon quebecIl ne faut pas s’étonner des coïncidences car c’est un ingénieur militaire toulonnais qui a participé à la construction de nombreux monuments et des fortifications de la ville de Québec de Montréal et de fort Niagara. En 1720, il a modifié et agrandit la cathédrale Notre-Dame de Québec ou il repose pour l’éternité.

chaussegros de lery notre dame de quebecEn France, peu de personnes savent qui était Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry car, envoyé en mission pour une année, il a fait toute sa carrière au Québec (40 ans).

Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry, est né le 3 octobre à Toulon, issu d’une dynastie d’ingénieurs militaires. Il apprend le génie militaire avec son père Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry qui avait travaillé comme maître-d ‘œuvre sous les ordres de Vauban. Son père avait participé à la construction de la porte royale d’entrée à l’arsenal militaire et celle du fort  de l’ Eguillette.

En 1716, ingénieur du roi, il est missionné et envoyé dans la Nouvelle France pour bâtir les défenses militaires en particulier à Québec et Montréal.

Il fait des recommandations sur les travaux à entreprendre pour assurer la défense de la jeune colonie inspiré par les préceptes de Vauban.

Il dessine les plans de la citadelle  de Québec, que les Anglais bâtiront entre 1825 et 1830 sur le cap Diamant, suivant les dessins de Chaussegros de Léry, manifestement d’inspiration Vauban.

Il est décédé le 23 mars 1756 à Québec et inhumé dans la cathédrale Notre Dame de Québec.

la « Place Royale » fut le premier lieu d’habitation des colons français. Cette place  chargée d’histoire est envoutante. Lorsque la nuit tombe, enveloppé dans un léger brouillard qui fait flotter les ombres sous des lampadaires à la lumière tamisée,qui paraissent d’époque,  on sent encore la présence des anciens colons qui séjournèrent en ce lieu. C’est comme un retour dans le passé.

PLACE ROYALEL’église « Notre-Dame » des victoires fut construite sur les vestiges de la maison de Samuel de Champlain.

Le Québec n’est pas une province c’est un Pays comme le chante si bien Gilles Vigneault. Les Québécois comme les Gaspésiens et les autres francophones sont pour beaucoup à l’origine du CANADA actuel. Je n’oublie tout de même pas les anglophones, qui ont également participé à la découverte de ce magnifique pays. Ce qui est plus gênant, c’est qu’ils ont voulu en faire une copie de leur pays d’origine sans tenir compte des spécificités des premiers habitants, les « amérindiens », et les premiers explorateurs qui s’étaient installés et qui, pour la plus-part venaient de Bretagne et parlaient le français.

Qu’auraient ils pensé, ces anglophones, si l’inverse se s’était produit, si on leur avait interdit de parler leur langue comme ce fut fait par le passé pour les québécois mais aussi chez nous, en France, pour les bretons, les corses, les basques ou les alsaciens.

Ils ne savaient pas quelle chance ils avaient, ces « tuniques rouges » de mettre un peu de « bleu de France » à leur uniforme, d’être bilingue « anglo-français » plutôt que de se dire: « les autochtones s’adapteront bien un jour et ils devront parler notre langue ».

Le « nombrilisme »  et le  » we are the best » n’a jamais fait progresser ni tourner la terre.

En 1905, Louis-Honoré Fréchette se battit pour que le drapeau du Canada français soit adopté pour la province du Québec.

Fréchette était un poète écrivain et homme politique né en 1839 à Saint Joseph de Levis et décédé en 1908.

Fréchette a écrit ce poème en l’honneur du drapeau québécois:

« Ô Montcalm ! ce drapeau témoin de tant d’efforts…

Et que la France, un jour, oublia sur nos bords !..

Qu’ils furent longs, ces jours de deuil et de souffrance !…

Nous t’avons pardonné ton abandon, ô France !

Ô drapeau ! vieille épave échappée au naufrage !
Toi qui vis cette gloire et qui vis cet outrage,
Symbole d’héroïsme et témoin accablant,
Dans tes plis qui flottaient en ces grands jours d’alarmes,
Au sang de nos aïeux nous mêlerons nos larmes…
Mais reste pour jamais le dernier drapeau blanc ! »

Les couleurs bleu et blanc avec les fleurs de lys et  la feuille d’érable en son centre, ornées de la devise :

« Je me souviens ».

De nos jours, toutes les plaques minéralogiques des voitures de la province du Québec portent la devise  » je me souviens ».

Finalement les quatre lys blancs dressés l’emporteront sur le fond bleu de la bannière de Montcalm, et le 21 janvier 1948, ce drapeau « fleurdelisé » que nous connaissons, claquera au plus haut mât du Parlement de Québec. Du blanc de France ne restera que la croix.

La description du drapeau est « d’azur à la croix d’argent cantonnée de quatre fleurs de lys du même ».

En héraldique,  » l’azur » correspond au bleu et « l’argent » au blanc.

La croix blanche représente le catholicisme et les fleurs de lys sont le symbole de leur attachement à la France.

Le salut au drapeau:

« Drapeau du Québec, salut !
À toi mon respect, ma fidélité, ma fierté.
Vive le Québec,
Vive son drapeau ! »

N’est-il pas beau ce pavillon bleu avec sa croix blanche et les quatre fleurs de lys blanches sur le « grand fleuve »

Une des plus belles chansons de Gilles Vigneault.

« Je crie à tous les hommes de la terre, ma maison, c’est votre maison »…

Cette chanson résume à elle seule la souffrance l’ouverture et le partage.

« Mon pays ce n´est pas un pays, c´est l´hiver
Mon jardin ce n´est pas un jardin, c´est la plaine
Mon chemin ce n´est pas un chemin, c´est la neige
Mon pays ce n´est pas un pays, c´est l´hiver « 

« Je crie avant que de me taire
A tous les hommes de la terre
Ma maison c´est votre maison
Entre mes quatre murs de glace
Je mets mon temps et mon espace
A préparer le feu, la place
Pour les humains de l´horizon
Et les humains sont de ma race »

http://www.youtube.com/watch?v=CH_R6D7mU7M

Une autre très elle chanson de Gilles Vigneault sur « les gens du pays »

http://www.youtube.com/watch?v=lHJ76KA7k4E

Nous aussi on se souviendra longtemps de ce merveilleux voyage chez nos cousins qui ont un réel plaisir à nous recevoir et nous faire connaitre leur « Beau Pays » dans ses plus belles couleurs d’automne

Tout au long du périple on est charmé par les couleurs, l’accent chantant, le sourire des québecois, les expressions croustillantes et pleines d’humour a nul autre pareil, dont voici un tout petit échantillon.

vu et entenduUn grand merci à Ian Beaulieu, notre guide, et Stéphane notre expérimenté « chauffeur de chaudière » qui ont su nous faire partager l’amour de leur pays avec compétence humour et gentillesse.

Ian dans la voie… maltée & Stéphane dans la voie… lactée (sobriété oblige, il aurait été préjudiciable que  la chaudière soit « chargée »).

Toronto underground, Ian et Stéphane à l’heure… des autographes…

torontoToronto, la ville souterraine

retour1Une dernière pour le vol !

L’ aéroport de Toronto

toronto2Kenavo le Canada, Québec ar wec’h all….! may be…

Octobre 2012